Crédit : Dominique Comtois

Que s’est-il passé en 2019 pour vous ? Est-ce qu’elle a été parsemée de moments agréables, paisibles et dans la continuité de votre évolution ? Ou a-t-elle plutôt été tumultueuse et pleine de rebondissements et d’imprévus ?

Au cours d’une vie, chacun d’entre nous est appelé à faire l’expérience de transitions plus ou moins importantes. Certaines que l’on provoque, d’autres qui s’imposent sans que l’on ait pu les voir venir. C’est un peu le reflet de mon année 2019. C’est ce qui explique pourquoi j’ai si peu écrit, par manque de temps et d’inspiration.

Une réflexion s’impose

Une enfilade de soucis et d’imprévus se sont succédés : refoulement d’égouts en début d’année, infiltration d’eau au sous-sol me laissant sans bureau pendant neuf mois, des divergences d’opinion avec l’assureur, divers problèmes avec des fournisseurs en plus de d’autres petits soucis physiques dont des blessures aux pieds (quatre fois plutôt qu’une tant qu’à y être!) et au genou. Il me semble que depuis plusieurs mois, la vie s’acharne à me dire de RALENTIR… Heureusement ce n’était pas la maladie. Une période où remises en question et décisions se bousculent pour faire place à la nouveauté.

Sortir d’une routine bien établie suscite son lot d’inconfort et d’insécurité. Pour faire face aux imprévus, aux épreuves de la vie, il faut beaucoup d’humilité et de patience avec soi-même. Surtout quand on est habitué d’être super performant, lâcher prise n’est certes pas le premier réflexe qui nous vient ! Dans les faits, les transitions nous rappellent que rien ne peut être tenu pour acquis. Pas même les fondations que l’on croyait inébranlables. Curieusement je viens de réaliser que j’ai comme « revisité » les mêmes appréhensions, les mêmes craintes, les mêmes insécurités qui m’ont été transmises 50 ans plus tôt.

Une expérience similaire

En 1969, mes parents, fiers terriens et cultivateurs de la région de Mirabel ont été dépouillés de leur propriété. Dès l’annonce faite par le gouvernement de l’expropriation des terres de la région, la maison et la terre familiales ne leur appartenaient plus. Le gouvernement a procédé à 3 000 expropriations sans avoir crié alerte. Le drame pour mes parents c’est non seulement qu’on leur arrachait ce qui était le plus précieux à leurs yeux, mais également leur principale source de revenu. Un regroupement d’une centaine d’expropriés insatisfaits de leur évaluation a multiplié interventions et pressions exercées auprès des paliers gouvernementaux pour négocier à leur juste valeur leurs biens immobiliers. Cette bataille s’est échelonnée sur une dizaine d’années. Quelle épreuve mais surtout quel gâchis lorsque l’on connait l’issue de cette mésaventure ! Une épreuve qui a laissé des cicatrices et a engendré des pertes financières importantes. La terre était tout ce qu’ils possédaient. Cela représentait toute leur identité.

Revisiter des émotions familières

Croyez-vous que des expériences passées influencent encore ce que vous êtes devenu aujourd’hui ? Faites-vous des liens entre certaines périodes de votre vie et vos réactions face à certains changements ou transitions importantes ? Il y a à peine quelques semaines que j’ai réussi à reprendre mon souffle face à cette année parsemée d’embûches. Je viens tout juste de réaliser que non seulement 1969 et 2019 sont séparées de 50 années mais que la période tumultueuse vécue à l’époque ressemble étrangement à ce que j’ai vécu cette année…

Après avoir observé la colère, la détresse, le découragement et la résilience de mes parents durant cette période difficile, je crois avoir développé, malgré mon jeune âge, de profondes convictions qui m’aident à mieux exercer mon rôle de conciliatrice et de médiatrice dans les démarches d’accompagnement que l’on me confie.  Je m’explique.

Les personnes qui font l’expérience d’un conflit qui s’étire dans le temps se réfugient souvent dans des positions fortes et cristallisées. Cela fait perdurer l’expérience d’émotions négatives et de sentiments d’insécurité, d’impuissance et de colère. Pour créer une ouverture à vouloir entamer un processus de résolution d’un différend avec ces personnes, cela requiert une certaine finesse et sagesse de la part du médiateur.  Ces sagesses, ce sont plus ou moins les convictions qui m’habitent depuis plusieurs années. Je vous les résume ici comme des leçons de vie.

Les leçons à cueillir

  1. Lorsque confronté à plusieurs imprévus sur une période continue, maintenir le cap sur l’essentiel permet de préserver sa santé ;
  2. En position de vulnérabilité, rester connecté à ses ressources internes permet d’accéder à ses repères et de prendre les meilleures décisions pour soi;
  3. Éviter le plus possible de rester emprisonné dans une situation d’impuissance prolongée car cela peut devenir toxique pour soi et son entourage ;
  4. Mener une bataille à la fois offre le sentiment d’avancer et d’éviter de rester coincé dans un sentiment d’impuissance ;
  5. Lâcher-prise permet de sortir plus rapidement du tourbillon sans y perdre toute son énergie ;
  6. Apprendre à composer avec l’adversaire, même si on n’en a pas envie et que l’on se croit plus faible, offre une occasion de s’affirmer pour mieux se respecter et se faire respecter des autres.

Je crois aussi que l’univers nous envoie des expériences à la hauteur de nos capacités dont le but est de saisir les occasions de refaire des choix éclairés qui soient les meilleurs pour nous. Et vous, quelles sont les convictions qui vous animent ?

Au plaisir de vous lire.

© Ghislaine Labelle, M.Ps., CRHA, Distinction Fellow, CSP (Certified Speaking Professional) et médiatrice accréditée

PS La capsule documentaire de Savoir Média qui a déclenché ma réflexion sur ce qui s’est passé à Mirabel est disponible ici.

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